Les maux…et les mots…

platonExtraits du dialogue Le Charmide de Platon

« … Ainsi tu l’as peut-être déjà entendu dire à d’habiles médecins : lorsqu’on va les consulter pour un mal d’yeux, ils vous disent qu’il n’est pas possible de chercher seulement à guérir les yeux, mais qu’il faut encore s’occuper de la tête si l’on veut que les yeux se portent bien, qu’ensuite c’est une grande folie de vouloir traiter la tête seule et de négliger le corps tout entier. D’après ces raisons, ils font des ordonnances pour le corps tout entier et tâchent de soigner et de guérir la partie avec le tout. Ne sais-tu pas qu’ils parlent et agissent de cette manière ?

Voici, Charmide, quelle est la nature de cette formule. Je l’ai apprise à l’armée, d’un des médecins de Thrace…Ce Thrace me disait que les médecins grecs faisaient bien de suivre la méthode dont je parlais tout à l’heure ; mais, ajouta-t-il, Zamolxis, notre roi, qui est un dieu, prétend que, s’il ne faut pas chercher à guérir les yeux sans la tête, ni la tête sans le corps, il ne faut pas non plus traiter le corps sans l’âme, et que c’est la raison pour laquelle les médecins grecs échouent dans la plupart des maladies, parce qu’ils ignorent le tout dont il faut prendre soin, et que, le tout n’étant pas en bon état, il est impossible que la partie se porte bien : que l’âme est la source de tous les maux et de tous les biens pour le corps aussi bien que pour l’homme entier, et qu’ils en proviennent comme ceux des yeux proviennent de la tête ; qu’il faut donc s’occuper d’abord et surtout de cette partie, si l’on veut que la tête et le reste du corps se portent bien….

Ce médecin m’apprit donc le remède et le charme, afin, disait-il, que personne ne se flatte de guérir sa tête au moyen du remède, s’il ne commence par livrer son âme au charme pour être guérie par toi : car telle est l’erreur des hommes, c’est qu’ils tentent d’être médecins en séparant ces deux choses.

« Les maux du corps sont
les mots de l’âme.
Ainsi on ne doit pas guérir le corps
Sans chercher à guérir l’âme. »

Platon